De Alain Lahaye
Les bons souvenirs - les vrais, les grands, les beaux, les meilleurs - c’était avec Salvatore. Mon compagnon, mon complice. Mon amour.
Pendant trente-cinq ans. Italien du sud pur sucre, arrivé en France dans les années cinquante, ouvrier chez Renault à Boulogne-Billancourt et fier de l’être. C’est là qu’on s’est trouvés. Il est venu un matin au secrétariat pour un problème de fiche de paie. Quand j’ai vu ses yeux, j’ai compris que l’affaire serait réglée en un temps record. Lui aussi.
Auparavant, il avait été mineur dans le Borinage, à l’époque où la Belgique offrait à l’Italie une tonne de charbon par italien immigré. La mine, il n’en parlait pas. J’ai compris plus tard qu’il y avait trop souffert. De plus, beaucoup de ses amis sont restés au fond. Ou victimes des grèves sévèrement réprimées par la terrible gendarmerie à cheval.
Mais bon, on n’est pas là pour parler de ça.
Mais bon, on n’est pas là pour parler de ça.